08 - Dieux, daimones, héros - VIDEO March 28, 2019

from Collège de France (Histoire des religions)·

Vinciane Pirenne-Delforge Collège de France Religion, histoire et société dans le monde grec antique Année 2018-2019 Un humain eudaimôn est « aimé des dieux immortels », ainsi que l’affirme Théognis. Dans ses Élégies qui font se succéder des sentences gnomiques et moralisantes où le terme daimôn a sa place, on perçoit clairement la valeur distributive des actions de daimones à qui est rapportée la répartition des biens et des maux dans la vie humaine. Cependant, quand il s’agit de prier pour obtenir un sort favorable, c’est à un dieu spécifique que l’on s’adresse, quitte à solliciter l’envoi d’un daimôn. Cette …



Vinciane Pirenne-Delforge Collège de France Religion, histoire et société dans le monde grec antique Année 2018-2019 Un humain eudaimôn est « aimé des dieux immortels », ainsi que l’affirme Théognis. Dans ses Élégies qui font se succéder des sentences gnomiques et moralisantes où le terme daimôn a sa place, on perçoit clairement la valeur distributive des actions de daimones à qui est rapportée la répartition des biens et des maux dans la vie humaine. Cependant, quand il s’agit de prier pour obtenir un sort favorable, c’est à un dieu spécifique que l’on s’adresse, quitte à solliciter l’envoi d’un daimôn. Cette hiérarchisation crée les conditions de la cristallisation de la puissance d’une dieu sous forme d’un agent telle qu’on l’a déjà perçue dans l’Odyssée et chez Sappho. Il arrive, comme dans le cas de Phaéthon, qu’un daimôn reçoive un nom propre. C’est ce que l’on trouve chez Théognis, où eris, l’espoir, et kindunos, le danger, sont considérés comme « des daimones redoutables » (v. 637-638). Mais, par ailleurs, eris est « la seule divinité bénéfique parmi les hommes », ce qui montre une fois de plus la participation du daimôn à la divinité et la fluidité des catégories. La comparaison de ces affirmations élégiaques et gnomiques avec l’expression de la condition humaine telle que la mettent en scène la Théogonie et Les Travaux et les Jours permet de voir à l’œuvre ces glissements entre statut divin et action démonique rapportée à un dieu. Les Épinicies de Pindare élargissent encore le champ en plaçant la distinction entre dieux et mortels dans le registre de la puissance et de l’action des premiers sur le cours de la vie des seconds. Cette action, qu’elle soit positive ou négative, passe à nouveau par le biais de l’action démonique. Et quand elle est positive, l’humain est bel et bien eudaimôn.